Floating Tone

Comme le titre l’indique, Floating Tone s’inspire d’une sensation de flottement, d’un monde fragmenté – dans les formes, les repères, les émotions – qui se trouve sous l’emprise constante d’un foisonnement d’images et d’informations visuelles. Les femmes qui s’inscrivent sur scène traversent cette fluctuation en reliant des fragments de postures, des mouvements épars, des éparpillements de sens et de vécus qu’elles recollent et restituent dans un renouvellement constant. Elles usent d’une forme de rituel et puisent dans ce flottement des qualités d’ouverture et de fluidité. En partant du concret – comment se (re-)positionner dans un monde contemporain incertain, où la fabrication et le brassage d’informations visuelles nous submerge –, l’approche chorégraphique se fait abstraite pour aborder l’intime, entrer en complicité avec des textures de lumière, de vidéo et de son afin de fabriquer une tonalité flottante, incertaine et légère. Sur scène, des décalages et des dédoublements invitent notre esprit à opérer une sorte de déplacement pour mieux appréhender l’étrangeté de notre existence. Tout tient au jeu des danseuses, à la manière dont elles enchaînent les postures. On voit des torses qui se courbent ou se cabrent, des corps qui penchent, des énergies étales ou qui s’emballent, des étourdissements, des latences, des béances. Dans leurs corps, les postures s’enchaînent, se traversent, se confondent, se décomposent ou se recomposent. Pour se conjuguer ensuite à d’autres corps, jouer avec des angles, des effets en trompe l’œil, en dialogue visuel et tactile. Dans ce champ infini, les figures sont déposées dans un monde trop vaste, trop vague, trop regardé. Elles puisent leurs formes dans le catalogue de la mémoire visuelle collective (photo de presse, web, publicité, TV, cinéma, arts visuels). Les sensations flottent. Les repères visuels ou temporels changent, discrètement ou brusquement ; ils se décalent et aspirent les interprètes dans une concentration douce, tenace et légère. Avec une complicité de chaque instant, Corinne Rochet, Caroline de Cornière, Anna Röthlisberger et Fabienne Berger négocient la manière dont elles modulent et adaptent l’écriture chorégraphique, selon des consignes précises, d’espace, de rythme et de qualité.